ORIGINE Japon | ![]() |
ANNEE 2005 | |
REALISATION
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INTERPRETES
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Critique Eli Eli, Lema Sabachtani ? | |||||||
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![]() Nous sommes en 2015 et l'humanité se sent affreusement seule face à sa triste condition. Un virus, le « Syndrome des Lemmings » (qu'un commentateur radio décrit comme étant le « kamikaze » de Dieu), a entrepris de pousser de vastes portions de la population mondiale à mettre fin à ses jours. Rien que dans l'archipel nippon, les ravages sont ainsi estimés à environ trois millions de suicides (une situation proche de celle dépeinte dans KAIRO). Pe ![]() Quoi qu'il en soit, ce fléau, cette fin du monde neurasthénique fait vivement penser à la mort thermique de l'Univers, à la victoire définitive de l'entropie. Les bâtiments sont laissés en jachère au bord des voies de communication. Il est difficile d'arracher un tant soit peu d'énergie au monde, comme en témoigne la scène où un personnage doit pédaler afin de produire de l'électricité dans son logement. Ce n'est donc pas le chaos qui menace. Cette épidémie de suicides semble uniquement déboucher sur un hiver éternel, une glaciation éliminant toute vie sans douleur véritable (le film, qui se déroule principalement durant l'automne, se clôt sur l'arrivée des premiers flocons de neige). C'est dans ce contexte peu encourageant que deux artistes, Mizui (l'omniprésent Tadanobu A ![]() Un grand-père, apprenant grâce au travail d'un détective privé qu'il emploie les vertus curatives de la musique de Mizui et ![]() Pourquoi la musique des deux comparses de « Stepin Fetchit » provoque-t-elle une rémission chez ceux qui s'y exposent ? La réponse n'est pas vraiment donnée par le film. Toutefois, on peut deviner que dans ce monde en train de se vider de toute énergie, la créativité déployée par le groupe - primordiale, non corrompue - vient contrer le processus de dépérissement de toute chose. En brûlant leur énergie sur scène, ils domptent les éléments, ils inversent le cours du déclin. Seul l'océan, sur lequel le film s'ouvre et auprès duquel ils vivent leur existence paisible, résiste à leurs assauts sauvages. Aoyama ne craint pas de malmener le spectateur, tant du point de vue sonore (la musique déchire parfois les tympans) que du point de vue de la mise en scène (il n'hésite pas à faire usage de longs plans-séquence qui confèrent au film son tempo mélancolique). Cependant, quand Mizui entreprend sa séance d'exorcisme, le montage s'accélère, les points de vue se multiplient, l'image se dédouble. Cette rupture stylistique renforce la violence, digne d'un orage estival, du traitement que fait subir le musicien à sa patiente. ELI ELI, LEMA SABACHTANI ? n'est donc pas à proprement parler un film d'anticipation. Il s'agit plutôt d'un commentaire radical sur l'état de la société nippone d'aujourd'hui, transposé dans un futur proche - une sorte de présent décalé. Attention : ce n'est pas une œuvre facile d'accès. Pourtant, pour peu que l'on suive le réalisateur dans sa démarche et que l'on s'abandonne à ce type extrême de musique, l'expérience peut se révéler prenante. Un très beau film par conséquent, mais qui aura comme unique tort de s'adresser à un public de connaisseurs.
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Eli, Eli, Lema Sabachteri ? | DVD Zone 2 | NC € |