ORIGINE USA | ![]() |
ANNEE 1976 | |
REALISATION
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INTERPRETES
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Critique Le convoi de la peur | |||||||
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![]() En 1976, William Friedkin sort de deux succès consécutifs : FRENCH CONNECTION d'abord et ensuite L'EXORCISTE, qui a révolutionné le film de peur et le box-office. Auréolé de cette gloire nouvelle, il veut défricher de nouveaux territoires cinématographiques et tente l'expérience, à la mode en ces années-là, de se frotter aux difficiles conditions de tournage de pays qu'on n'hésitait guère à l'époque à qualifier de sous-développés. Auparavant, Werner Herzog avait posé les jalons du genre avec son séminal AGUIRE, LA COLÈRE DE DIEU (1972, Tangerine Dream, alors embarqué pour la musique, signe d'ailleurs également celle de SORCERER). Pa ![]() Friedkin va, lui, tourner à Paris, Mexico, Jérusalem et en république Dominicaine... et ce pendant une année entière. Un tournage qui fut, lui aussi, loin d'une partie de plaisir, émaillé de maladies, d'accusation de trafic de drogue à l'encontre d'une partie de l'équipe, d'explosion du budget, et rendu encore plus éreintant par le tempérament pour le moins difficile de son réalisateur. A l'instar des Herzog et Coppola précités, ce genre d'ambiance de plateau percole petit à petit vers le public qui en cristallise une version mythifiée qui pare le résultat du label culte, que corroborera l'échec commercial afférent. Ce qui n'enlève, précisons-le tout de suite, rien au résultat artistique, maitrisé de bout en bout. On a coutume de dire que le voyage vaut plus que la destination. C'est encore plus vrai dans cette histoire qui voit des pécheurs (meurtrier, terroriste, ![]() Au plan du seul spectacle, on reste scotché par les séquences du voyage, qui créent une pure tension avec ses camions en ruine brinquebalants sur des nids de poule, ballotés sur des ponts déliquescent, soumis aux caprices et colères d'une mère nature bien peu maternelle. Auparavant, William Friedkin aura pris le temps nécessaire à présenter assez longuement nos protagonistes, ou plus exactement à filmer la chute sociale de chacun d'eux. En rentrant ensuite dans le cœur de l'action, nous obtenons alors des personnages réellement forgés, et non ces évocations poseuses qui les remplacent dans trop de films contemporains prompts à sacrifier sur l'autel de l'efficacité et du tape-à-l'œil de pourtant bien nécessaires séquences dites « d'exposition ». L'Amérique latinedu CONVOI DE LA PEUR est une outrance. Au-delà même de la vision qu'on pouvait en avoir à l'époque, on ne trouve ici qu'un monde de pauvreté, de crasse, de misère, d'exploitation (par la junte militaire, et par le capitalisme dénué de scrupules qui s'y est allié), où la vie humaine n'a aucune valeur. On pointe d'ailleurs plus une idée abstraite, un fantasme d'Amérique latine, plutôt qu'un pays précis : à peine un bref plan de passeport indique—t-il au final la Colombie, sans même que ce soit nécessairement le lieu de l'action. Auparavant, le mafieux qui a aidé à exfiltrer le personnage de Roy Scheider annonce l'indétermination du purgatoire en lui assurant « n'avoir aucune idée de l'endroit où il sera envoyé ». Le climax de tension est atteint avec une séquence - démente - de traversée d'un fleuve déchainé sur un pont vermoulu et branlant. A une époque où on ne pouvait même imaginer les truquages numériques contemporains, l'exploit impressionne. LE CONVOI DE LA PEUR est certes une adaptation du livre « Le salaire de la peur » de George Arnaud, mais bien plus encore une nouvelle variation de l'adaptation de ce roman, après celle, excellente, réalisée par Clouzot en 1952. Friedkin explique ne pas avoir voulu simplement refaire le film de Clouzot, lequel est remercié dans le générique final, mais bien avoir développé, sur le même canevas, de nouvelles péripéties, pour en changer l'approche. Ce n'est donc pas un hasard si le titre original - SORCERER - diffère radicalement de celui de son modèle. L'échec du film au box-office - et l'origine française du modèle - pousseront le distributeur hexagonal à lui préférer un titre plus directement référentiel : LE CONVOI DE LA PEUR résonne en effet mieux en écho au SALAIRE DE LA PEUR originel. Le titre d'exploitation américain, SORCERER - le nom donné à un des camions de transport -, reste moins bien compris et a pu induire en erreur une partie de son public sur la nature du film. Parabole, évocations visuelles outrées, séquence de tension efficaces, voire matamoresques, cheminement vers la folie, SORCERER se pare de tant d'atouts qu'on ne peut que se réjouir de le redécouvrir dans de bonnes conditions, suite à la ressortie en salle en 2015 et les rééditions sur supports vidéos (DVD et Blu Ray)
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