ORIGINE Italie | ![]() |
ANNEE 1976 | |
REALISATION
| |
INTERPRETES
|
|
|||||
Critique San Babila : Un crime inutile | |||||
---|---|---|---|---|---|
![]() Force est de reconnaître que SAN BABILA : UN CRIME INUTILE bénéficie pleinement, quoique avec une certaine modestie liée à son statut de production de genre, de ce constat. S'inscrivant dans la veine du thriller politique tel que chez nous Yves Boisset ou Alain Jessua ont pu aussi nous livrer quelques fleurons, le film s'applique à démonter la mécanique conduisant à un crime des plus ignobles et ineptes à la fois. Carlo Lizzani nous expose durant les différentes étapes d'une journée les divagations d'un quatuor de jeunes militants néo-fascistes, apprentis terroristes, depuis une matinée qui débute par l'enterrement d'un vieux fasciste jusqu'à un début de soirée tragique. Au delà de leurs agi ![]() Franco et Miki sont deux jeunes issus d'un milieu aisé, tendance « fils à maman ». Miki est clairement le chef de la bande (c'est d'ailleurs lui qui possède une voiture), un étudiant qui se plait à faire briller sa plume quand il s'agit de dénoncer dans ses dissertations la déliquescence du monde moderne et de mettre en avant des thèses fascisantes. Franco quant à lui apparaît plus timoré et est poussé par les autres à constamment faire ses preuves, tant sur le plan de l'activisme militant que sexuel. Deux domaines dans lesquels il se révèlera passablement vierge, mai ![]() Alfredo est le prolo du groupe. Petit employé « modèle » dans une boutique, il est déjà marié (on apprendra cependant qu'il a violé sa femme quand elle avait 14 ans) et père d'un enfant. Son désir de ressembler aux autres et d'être reconnu par eux est flagrant et il trouve dans le mouvement néo-fasciste une forme de valorisation sociale. Fabrizio, enfin, est le beau parleur et le fier à bras, enclin à pérorer et à se lancer dans des diatribes et des suites de clichés qui sentent le Nietzsche mal digéré. Ses exploits d'être supérieur se limitent en fait à tabasser une femme qui ne veut pas lui obéir et à pousser les autres à agir, s'impliquant assez peu ; et toujours couvert par le nombre, il est vrai. Au demeurant, ce délicieux personnage fait aussi office d'indic pour la police ou un journaliste de gauche, poussé par ses intérêts propres ou l'appât du gain. Une belle brochette qui puise sa force dans le phénomène de meute, dans son apparence et ses c ![]() La force de SAN BABILA... est d'être fortement ancré dans le réalisme. Carlo Lizzani déjà, décide de tourner en partie son film Piazza San Babila, une place de Milan délimitant le périmètre ou se cantonnent les militants d'extrême droite dans les années soixante dix et également le lieu où s'est déroulé le fait divers réel dont s'inspire le scénario. Il y a là de sa part une audace et une prise de risque non négligeables, vu les tensions qui secouent l'époque. Cela lui permettra néanmoins de tourner quelques séquences sur le vif, enregistrant les réactions de passants sous un angle quasi documentaire, en particulier lors d'un (faux) défilé de militant néo-fascistes au pas de l'oie, d'une manifestation (bien réelle cette fois-ci) de syndicats gauchistes, ou encore d'une scène où les quatre compères s'exhibent en pleine rue avec des godemichés. L'utilisation fréquente de longues focales rajoute un aspect reportage évident à ces passages. Le fait d'employer majoritairement des acteurs inconnus participe également grandement à la démarche. En termes cinématographiques le morceau de bravoure du métrage reste cependant la longue séquence de traque et d'agression qui motive le titre. Ici, la photographie et l'atmosphère froides qui baignent déjà une bonne partie du film trouvent leur point d'orgue dans des architectures rendues plus imposantes et désertées, où les rares passants ne sont plus, de manière emblématique, filmés que de dos et réduits à de simples silhouettes furtives, et où le rythme du montage et l'alternance des angles nous donnent encore l'espoir que tout ne se conclue pas de manière tragique. Les dernières images, quant à elles, nous laissent comprendre que Lizzani se désintéresse complètement du sort de la triste bande. Attitude à laquelle le spectateur adhère totalement, tout compte fait, et de manière logique au vu de la construction du récit. En tant que révélateur et témoin d'une époque, de celle qui s'étendra de la fin des années 60 au début des années 80, SAN BABILA : UN CRIME INUTILE mérite d'autant plus notre attention qu'il pourra trouver des échos dans notre la notre, à bien y regarder...
|