
Paul Orlac, pianiste talentueux, après un dernier récital, retourne auprès de sa femme Yvonne. Hélas, un terrible accident de train laisse le musicien avec une fracture du crâne et deux mains détruites. Imploré par Yvonne qui lui explique combien son mari a besoin de ses mains, le docteur Serral tente alors l'impossible. Il va greffer à Orlac les mains de Vasseur, un assassin qui vient d'être guillotiné. Peu de temps après son réveil, le pianiste apprend qui était le propriétaire de ses nouvelles mains par une lettre anonyme. Dès lors son esprit vacille, ses mains refusent de jouer du piano et il commence à avoir des visions meurtrières et se sent basculer dans une folie homicide. Peu de temps après, son père, vieillard avare et fort r

iche, est assassiné. Le poignard ayant servi au meurtrier est celui de Vasseur, de même que les empreintes relevées sur les lieux du crime...
Robert Wiene restera célèbre pour avoir réalisé le premier film expressionniste avec LE CABINET DU DOCTEUR CALIGARI (1919). Il poursuivra son œuvre au sein de ce courant artistique avec GENUINE (1920) puis RASKOLNIKOV (1922). Par contre, HANDS OF ORLAC n'appartient pas à ce genre, les seules traces d'expressionnisme se trouvant dans les décors de la demeure du père d'Orlac, avec son immense couloir en ogive et la niche dans laquelle il trône. Hormis ce court passage, le film se veut réaliste, preuve en est la superbe et très longue scène des conséquences de l'accident de train. Au cœ

ur de la nuit, entre les carcasses métalliques encore fumantes, se croisent, à la lueur de torches, rescapés hagards et équipes de secouristes dans un incessant ballet macabre. Le reste du film conservera ce côté réaliste et l'intrigue policière va réserver son lot de surprises et de retournements de situation sans jamais avoir à renier son argument fantastique de base, à savoir l'entrée dans la folie d'un homme à qui l'on a greffé les mains d'un criminel.
Malgré un postulat de départ assez casse-gueule et quelques explications finales légèrement tirées par les cheveux en raison de l'âge du film, le scénario tient parfaitement la route. Il faut dire qu'il s'agit de la première adaptation d'un roman de Maurice Renard, Les Mains d'Orlac

, paru en 1920. Renard, écrivain français trop peu connu, féru de sciences, va élaborer la trame de son récit suite à ses lectures des publications du docteur Alexis Carrel. Ce talentueux chirurgien vasculaire avait développé de nouvelles techniques pour l'anastomose des vaisseaux, démontrant ainsi les possibilités de fonctionnement à long terme d'organes réimplantés. Ses travaux sur les greffes lui ont permis d'obtenir un Prix Nobel de médecine en 1912. C'est ainsi que le médecin qui va pratiquer la greffe des mains sur Orlac se verra affublé du patronyme Cerral dans le roman, pour curieusement devenir Serral dans le film de Wiene.
Les nombreuses qualités scénaristiques ne suffisent cependant pas à masquer les tares inhérentes aux films muets de cette époque. Aussi l'exagération perpétuelle du jeu des acteurs devient parfois pénible à mesure que les scènes se prolongent. Et c'est là que se trouve le principal défaut du film, dans la durée des plans. Alors que l'intrigue se déroule sans temps mort, les scènes semblent s'étirer à l'infini, diluant ainsi la dynamique de l'action au risque de provoquer l'ennui. On est hélas loin de la parfaite concision du montage du DOCTEUR MABUSE (1922) de Fritz Lang. C'est pour cette raison que HANDS OF ORLAC s'adressera prioritairement aux archéologues du cinéma. Les fans de bis se tourneront plutôt vers les deux autres adaptations du roman, à savoir MAD LOVE (1935) de Karl Freund et LES MAINS D'ORLAC (1960) d'Edmond T. Gréville.
Éric Peretti 22/12/2009 |
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